Bac en juin : l'enseignement supérieur salue le report des épreuves de spécialités
Avec le report des épreuves de spécialité au mois de juin, ces notes ne seront plus intégrées au dossier Parcoursup. Mais après une première expérience mitigée en 2022, les formations sélectives approuvent ce rétropédalage et se préparent.
C'est l'une des annonces qui a marqué la rentrée 2023 : le report des épreuves de spécialité du bac général et technologique au mois de juin.
Initialement, la réforme du bac prévoyait ces épreuves au mois de mars afin de les inclure aux dossiers Parcoursup des lycéens, et ainsi donner des éléments complémentaires aux formations sélectives.
"Un retour au bon sens"
Repousser les épreuves de spécialité de quelques semaines a pour principal objectif la reconquête des mois d’avril et mai, désertés par les lycéens de terminale déjà fixés, pour la plupart, sur leurs résultats au bac. De nombreux responsables de formation saluent cette décision.
"C’est un retour au bon sens après la démobilisation des lycéens", se réjouit Denis Choimet, président de l’UPS (l'union des professeurs de classes préparatoires scientifiques). Car la démobilisation a entraîné une perte de rythme et une moins bonne connaissance d’une partie des programmes, alors que l’entrée dans le supérieur induit "un rythme et des exigences plus soutenus".
Ce passage entre le lycée et les études supérieures peut être "un choc violent" pour certains élèves pas suffisamment préparés, constate Mick Dupont, responsable des admissions à l'école d’ingénieurs EFREI. "Arriver en école d'ingénieurs, en prépa ou même à l’université après s’être tourné les pouces pendant plusieurs mois, ce n’est pas la meilleure stratégie."
En mars, des notes de spécialité inégales
Initialement, les notes des épreuves de spécialité devaient apporter une information supplémentaire pour la sélection des candidats dans les formations sélectives. "Comme le bac est une épreuve nationale, les notes de spécialité devaient permettre de bonifier l’analyse des dossiers", explique Thierry Delecolle, directeur du développement à l'école de commerce EMLV.
Mais en définitive, les formations ont constaté des écarts de notes importants en fonction des disciplines.
"Il n’y a pas eu d’harmonisation entre les spécialités. En mathématiques, les notes étaient très élevées alors qu’en HGGSP ou SES, par exemple, nous avons constaté des notes plus basses", précise Alain Joyeux, président de l’association des professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales (APHEC).
Cette différence de notation entre les épreuves de spécialité a créé une inégalité entre les candidats. Par exemple, ceux qui n'avaient pas pris la spécialité mathématique étaient notés plus sévèrement dans leur discipline.
Des notes qui ne reflètent pas toujours le niveau réel des élèves
Mais le manque de préparation et l'injustice entre les candidats n'ont pas été les seuls biais observés en 2022. Ainsi, alors que "ces notes devaient traduire l’engagement des élèves tout au long de l’année", Thierry Delecolle souligne qu'elles ne reflètent pas toujours le niveau réel des élèves.
Dans la classe préparatoire où il est professeur de mathématiques, Denis Choimet a en effet constaté que la moitié des candidats ont obtenu 20/20 à l’épreuve du bac. "Si on met de très bonnes notes à tout le monde, l’information perd sa pertinence, car vous ne pouvez plus faire la différence entre les candidats."
À l’EFREI, "90% de nos étudiants ont eu plus de 15/20 en maths, mais lorsqu’on compare cette note à leur moyenne générale de l’année, on a un écart de trois points", précise Mick Dupont.
Un retour vers les anciennes modalités de sélection
Les formations sélectives vont maintenant devoir s'adapter à ce changement. Sans difficulté à en croire Thierry Delecolle : "On va recruter comme on recrutait avant l’année dernière".
Pour certaines, il s’agit de renforcer les concours d’entrée, principalement à l’écrit, pour redonner une "égalité" de traitement entre les candidats. "Un concours où la notation est la même pour tout le monde redonne un peu d’équité entre les candidats", explique Mick Dupont.
Le réseau Sciences po, qui rassemble sept IEP (instituts d'études politiques), a déjà fait savoir qu'en 2024, seules les trois épreuves écrites seront prises en compte dans la sélection des candidats : l'épreuve de question contemporaine, d'histoire et de langues.
Sciences po Paris envisage de son côté de rétablir une épreuve écrite au concours 2024. Lors de sa conférence de rentrée, son directeur Mathias Vicherat n'exclut d’ailleurs pas la possibilité d'une épreuve à distance.
À l’EMLV, "nous allons donner plus de poids aux notes de 1re et au contrôle continu" explique Thierry Delecolle. Alors qu’en prépa scientifique, les éléments qualitatifs des dossiers comme "les appréciations des professeurs ou encore le projet de formation motivé" seront regardés avec attention, précise Denis Choimet.