Écoles d'animation : un cursus qui ne manque pas de relief
De nombreuses écoles forment aux métiers de l’animation, mais chacune d’elles présente des spécificités en termes de pédagogie et de débouchés. L’Etudiant vous apporte les précisions nécessaires pour faciliter votre choix.
"L’école qui monte", c’est en ces termes que les professionnels que nous avons interrogés évoquent ArtFX, une école montpelliéraine spécialisée dans les VFX, les plans réels truqués (par exemple, un acteur filmé devant un fond vert remplacé par un décor futuriste en 3D). ArtFX dispense trois formations : réalisateur numérique, jeux vidéo et programmation.
La première des cinq années d’études qui composent le premier cursus en animation fait la part belle à la matière, aux objets tangibles. Les bacheliers s’initient au dessin à la main, à la sculpture, à la photographie, ainsi qu’à l’histoire de l’art. Les logiciels (Maya pour la 3D ; Nuke pour les VFX), et les outils numériques font progressivement leur entrée dans le programme, dès la deuxième année. L’un des premiers exercices de maîtrise des logiciels consiste à construire des personnages à l’aide de petites briques numériques semblables à des Lego. Selon le parcours, la spécialisation se fait en troisième ou quatrième année, celle du stage en entreprise.
Le projet de fin d’études parachève le cursus. Réunis par petits groupes, les étudiants des différentes formations ont une année pour réaliser un court-métrage quasi professionnel. Un exercice qui doit aboutir à la pièce maîtresse de leur book, le dossier artistique indispensable pour postuler dans les studios d’animation. Précisons que l’école ArtFX a remplacé les notes par des appréciations. Une compétence est "acquise", "en cours d’acquisition" ou "non acquise".
Le top des écoles d'animation
Écoles |
Nombre de points |
Nombre de citations "écoles préférées" |
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44 |
22 |
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35 |
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LISAA animation et jeu vidéo, Paris |
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Le crayon avant le clavier
Si les étudiants et les jeunes diplômés d’ArtFX sont plébiscités pour leur maîtrise des logiciels 3D, les studios saluent le coup de crayon des animateurs formés à Émile-Cohl. L’école lyonnaise ne désapprouve pas cette "étiquette". "Notre programme abolit les frontières du dessin", résume Aymeric Hays-Narbonne, adjoint de direction. Les trois premières années, qui sont communes à l’ensemble des étudiants, se composent de cours théoriques (anglais, culture cinématographique, histoire de l’art, scénario) et d’enseignements pratiques en atelier (bande dessinée, dessin animé, dessin d’objet et de personnage, modèle vivant, perspective, sculpture, programmation).
La formation au dessin se fait en trois temps. Les élèves apprennent à observer et à reproduire fidèlement, à jongler avec les différents outils narratifs pour s’adapter à un public et faire naître une émotion précise, puis à trouver leur propre style. À Émile-Cohl, le traditionnel projet de fin d’études est un film individuel, d’une durée de trois minutes, afin de "préparer les étudiants aux différentes facettes du métier – comme l’animation ou la réalisation –, et leur permettre d’identifier leurs forces et leurs faiblesses". C’est là une des caractéristiques de l’école.
Des travaux qui nourrissent le book
Tout comme Émile-Cohl, Gobelins met l’accent sur le dessin à la main. L’institution parisienne – quarante ans d’animation – propose pas moins de cinq formations, de la nouvelle prépa (préparation artistique et technique aux concours d’entrée des écoles d’animation mondiales, non diplômante) au cursus historique en quatre ans, intitulé concepteur et réalisateur de films d’animation. "Nous avons mis en place une pédagogie par projet, ce qui signifie que les étudiants ont plus de cours pratiques que théoriques", décrypte Moïra Marguin, la responsable du département cinéma d’animation des Gobelins. Chaque année d’études comporte cinq ou six projets d’une durée de quatre à huit semaines. Le projet intitulé "physique du mouvement", par exemple, amène les étudiants du cursus en quatre ans à animer, au crayon à papier, un poisson dans l’eau, un lanceur de poids, ou encore un hamster dans sa roue. En fin de deuxième année, ils réalisent, par équipe, les petits films d’ouverture projetés devant toute la profession au très réputé Festival international du film d’animation d’Annecy.
L’animation, fenêtre sur le monde
"Dans le monde de l’animation, les projets franco-français sont rarissimes. On est amené à travailler avec des équipes étrangères ou à réaliser des films à destination d’un public non francophone", constate Moïra Marguin. En d’autres termes : l’international concerne aussi ceux qui ont prévu de faire carrière en France. Dans les écoles, les occasions de côtoyer des personnes venant du monde entier ne sont pas rares : ArtFX a créé une classe internationale dans laquelle les cours sont dispensés en anglais ; Isart Digital (Paris) a ouvert un campus à Montréal, au Canada ; et dans le cadre de son cursus long, Gobelins offre notamment la possibilité d’effectuer un échange académique dans l’une des plus prestigieuses écoles d’animation étrangères, telles que le California Institute of the Arts (États-Unis) ou The Animation Workshop (Danemark). Précisons d’ailleurs que Gobelins compte près de 30 % d’étudiants étrangers.
Le dessin, une épreuve obligatoire du concours
La majorité des écoles de notre classement recrutent directement après le bac, y compris Gobelins pour son cursus phare en quatre ans. "Pendant longtemps, seuls un ou deux bacheliers parvenaient chaque année à intégrer la formation. Cela est en train de changer. À la rentrée 2017, par exemple, 5 des 28 étudiants étaient tout juste sortis du lycée", tient à préciser Moïra Marguin. Gobelins ouvrira une prépa en septembre prochain, à destination de ceux qui n’ont pas le niveau d’excellence en dessin requis pour intégrer le cursus de concepteur (580 candidats pour une trentaine de places).
En général, le concours d’entrée des écoles d’animation comporte à la fois des épreuves écrites (anglais, connaissances artistiques, culture générale), des épreuves de dessin (à main levée, storyboard) et un oral portant notamment sur les réalisations du candidat. Pour un cursus spécialisé VFX, par exemple, le jury attend de celui-ci qu’il ait réalisé des photographies ou des vidéos truquées.
Une folle envie de raconter
L’oral est l’occasion de mettre en avant toutes sortes de compétences… Afin de détendre et de mieux connaître les candidats stressés par l’oral d’admission, Thierry Brionnet, le directeur pédagogique du département animation d’Isart Digital, a pour habitude d’ouvrir les hostilités par cette question : "Quelles sont vos passions en dehors de l’animation ?" Un jour, un candidat lui a répondu, de but en blanc : "La pêche à la mouche". "On a échangé sur son hobby pendant une bonne quinzaine de minutes. Il m’a littéralement transporté au bord de l’eau", rapporte le directeur pédagogique, avant d’ajouter : "Cette folle envie de raconter est indispensable pour réussir dans l’animation." Le candidat en question a été admis.
Nous avons demandé aux studios les petits plus qui font la différence au moment de la recherche d’un stage ou d’un premier emploi. Damien Levy, producteur exécutif au studio d’animation Normaal, recommande de "présenter des travaux en adéquation avec la nature du poste", et aussi de "soigner tout particulièrement la couverture et les premières pages du book". Le portfolio doit être "facile et rapide à télécharger, organisé, clair, le résultat d’un tri exigeant", selon Lucile Boileau de Studio 100 Animation. Benoît Godinot, le DRH des studios français d’Ubisoft (Paris, Montpellier, Bordeaux, Annecy), apprécie les candidats qui ont une connaissance et un intérêt pour les différents métiers du jeu vidéo. Il précise : "Un graphiste ou un designer doit connaître les outils et les contraintes des développeurs, par exemple."